domingo, 26 de setembro de 2010

Martha (Rainer Werner Fassbinder, 1974)

La première rencontre des deux protagonistes principaux... Il appelle un taxi, et sans raison apparente elle semble accourir vers lui, ce qui préfigure tout à fait de la suite du film. Depuis les bras croisés d'Helmut et son air martial souligné par la rigidité de la statue, jusqu'à Martha finissant en cage et l'air éploré derrière sa grille, s'est "juste" passé un travelling à 360° transformant les personnages en danseurs et la rencontre en une apothéose (mais côté Année des 13 lunes, il y aura encore une rencontre où les personnages se tourneront autour, seulement la caméra n'entrera pas dans la danse...)



































sexta-feira, 24 de setembro de 2010

Travellings

Faire marcher un personnage le long d'un mur est le premier acte cinématographique (tous les grands cinéastes s'y sont essayés). 
(Deleuze, Critique et Clinique)

La fin de Les 400 coups (Truffaut) :



Le début de Les dieux de la Peste (Fassbinder) :
















Le début de Ossos (Pedro Costa)

Question : un travelling dont vous vous souvenez ?

Ariel (Kaurismaki, 1988)

Hier à la cinemateca portuguesa, remerciements éternels à Kaurismaki d'avoir des personnages mutiques et des histoires claires, c'est plus pratique pour comprendre le finlandais sous-titré en portugais.


Le film commence par une nature morte : escaliers de métal, ombres projetées, silence, immobilité. Et puis parce que c'est du cinéma, les choses s'animent, des sons d'abord, des ombres humaines ensuite, les corps qui les suivent et surgissent du bas quant on ne sait encore par où les attendre. La caméra suit vers la surface, et c'est un tractopelle qui ouvrira la porte et redessinera les contours de l'écran dans un flot de lumière blanche vaporeuse, épaisse comme celle bleutée d'un projecteur où volitige la poussière. On a quitté la mine (qui explose et rend tout le monde chômeur) mais c'est l'ouvrier qui entraîne la caméra, on l'aura compris.



Et il a beau s'être élevé depuis les tréfonds de la terre, la trajectoire qu'il suivra par la suite ne sera pas celle d'une élévation sociale. Mais Kaurismaki ne file pas la métaphore, lui, et la Finlande étant plate comme une plaine de neige - ce que la Cadillac tout aussi plate et tout aussi blanche rappelle en écho - le personnage ira de mal en pis, mais horizontalement. Pas besoin de descendre dans les bas-fonds pour que les choses soient pires, il suffit de manger un hamburger pour se faire voler son argent, et de croiser plus tard son agresseur dans le métro pour se retrouver en taule à avoir voulu se venger.

Kaurismaki se plaît à la plus stricte économie : la première séquence, sans dialogue, est exemplaire. On comprend tout en quelques mouvements de caméra, depuis le casque de chantier balancé à la poubelle, jusqu'à la porte de la mine cadenassée dans un plan à la composition implacable. On ne s'y arrêtera pas cependant, parce que si Ariel flirte avec l'économie narrative propre à la série B, c'est bien parce qu'il y a avant tout une histoire à raconter, quoique le pitch puisse être résumé en une phrase (tout va de mal en pis pour un mineur nouvellement chômeur). Kaurismaki va jusqu'à boucler parfaitement son film en faisant du mot de la fin celui du titre. Et les coincidences ne font pas peur, d'ailleurs le public adhère, mais on pense aux Coen (mais c'est peut-être à cause de la neige de Fargo) et à leurs histoires tenant toujours sur l'improbable (depuis le bip-bip du traceur de No country for old men jusqu'aux incroyables catastrophes en chaînes transformant en Job des temps modernes le personnage de A serious man).

Efficacité est donc le maître mot, ce à quoi font pendant les compositions géométriques et harmonieusement colorées de chaque plan. Que personne ne m'assassine si je trouve là-dedans à voir avec Pedro Costa, et ses natures mortes de Ossos ou de En avant jeunesse (cf. l'article de Rancière sur la politique de Costa si ça intéresse quelqu'un) : comme si Kaurismaki voulait lui aussi donner à voir une beauté du monde qui est à notre portée et qu'il s'agit d'apprendre à voir. Cependant, il est mieux d'apprendre à la voir à deux, d'où l'histoire d'amour et l'histoire d'amitié.

Le film continue d'être simple (ils s'aiment et se marient ; ils se rencontrent en prison et s'aident à s'évader), mais Kaurismaki joue de l'humour avec virtuosité, ce qui rend les relations entre les personnages autrement plus profonde. On sent palpiter la caricature derrière les personnages (voir le costard de gangster et les lunettes noires de Taisto à la fin, très tarantinesque à les garder même de nuit), mais Kaurismaki en joue en maîtrisant à fond des codes hérités de l'efficacité hollywoodienne. Il introduit le décallage par ce jeux d'acteurs si inexpressif et mesuré - la Cadillac pouvant être l'image même de ce décallage, objet de luxe qui n'a pas grand chose à faire entre les mains de Taitso - et instille une bonne dose d'humour en ne sacrifiant rien à l'émotion. Voir la réplique de Taitso quand Irmeli lui annonce qu'elle est divorcée et a déjà un fils : "tant mieux, on ne perdra pas de temps à fonder une famille". Voir aussi la mort du fidèle Mikkonen, qui s'enterrera lui-même en trouvant enfin le bouton pour fermer le toit de la décapotable. Kaurismaki se joue avec finesse des attentes du spectateur en secouant doucement et comme sans y prendre garde des conventions attendues. Bien sûr qu'il y aura le fameux plan hollywoodien de la fenêtre pour signifier que le couple a fait l'amour, mais ce ne sera pas un échappatoire permettant d'éviter une image choquante. Au contraire, la caméra suit un chemin inverse : depuis la fenêtre jusqu'au lit ou le couple, déjà couple, fait un peu tard des présentations cérémonieuses. Et lorsque la caméra repart en chemin inverse, ce n'est pas pour les laisser à l'intimité de rapport plus intime mais seulement pour les laisser dormir.

Ainsi la gravité du propos est compensée par la légéreté apparente du film. On est en terrain connu, lorsqu'on y est pas un humour poétique supplée pour ne pas trop perdre le spectateur, et celui-ci en oublie presque que le personnage a faim et froid, ne trouve pas de travail, fabrique son alliance en prison, et que le fils d'Irmeli propose un inquiétant renouvellement de génération en étant le premier à pointer une arme à l'écran. 

Je suis restée sur ma faim à la fin du film, peut-être parce que cette histoire trop simple semble cacher quelque chose. Comme dans Juha, où il ira jusqu'au muet et au noir et blanc pour revisiter L'Aurore, Kaurismaki cherche un cinéma épuré. Peut-être pour laisser au spectateur le loisir de se souvenir d'une image, d'une composition, d'un plan ; peut-être pour qu'il y condense tout le film. Pour ma part,  c'est le premier plan.

quarta-feira, 22 de setembro de 2010

Estória do Gato e da Lua (Pedro Serrazina)