Depuis
la passerelle de la gare de Gardanne, panorama sur l'usine ocre d'où semble
émaner une odeur douçâtre et sourdre la teinte rouge qui couvre les murs de la
ville. Peut-être Banksy aurait-il pu y tracer quelques-uns de ses graf', mais
il préfère les réserver aux murs cinématographiques de son docu
Faites le
mur. Qu'importe : s'il n'était pas à Gardanne, son docu est venu à sa
place, et il n'y était pas seul. Les platanes de la rue principale (et unique)
de Gardanne n'avaient jamais vu autant d'inconnus se précipiter sur d'innocents
kebabs et les engloutir sans même s'informer du résultat du dernier match de
l'OM. L'épisodique phénomène (du 21 octobre au 1er novembre 2011) a cependant
paru se limiter aux abords directs du cinéma des 3 casino. Est-ce de là
qu'ont surgis ces étranges individus aux regards rêveurs ? Ou bien venaient-ils
de plus loin, voyageurs immobiles (trans)portés par la programmation très
internationale du 23ème festival cinématographique d'automne ? De soirée
italienne en hommage au cinéma sud-américain ou iranien, elle est faite d'un
panorama de films d'ici et d'ailleurs...
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Curling |
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La dernière piste |
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Les couleurs de la montagne |
Prêt
à vous geler les doigts en passant le balais devant le palet de
Curling de
Denis Côté ? Prière de ne pas s'égarer dans les très blanches images de
tempêtes de neige, vous risqueriez de tomber sur un tas de cadavres congelés !
Mais vous regretterez l'eau canadienne, aussi gelée soit-elle, lorsque vous
devrez traverser le désertique Oregon de 1845 dans
La dernière piste.
D'autant plus que Michelle Williams en «
pilgrim » arpentant
les grands espaces de ce qui n'est pas encore les Etats-Unis, mais en a déjà la
métaphysique, va vous faire venir l'eau à la bouche. L'errance sans fin du très
beau film de Kelly Reichardt n'est pas le seul à remplacer la parole par le corps
en mouvement : plus au sud, vous voilà pris en stop par l'argentin Pablo
Giorgelli auprès du camionneur de
Les Acacias. Il ne sait pas qu'un bébé
vous accompagne, car vous étiez déjà passé par le Pérou de
Octubre
(Diego Vega Vidal), où un gamin braillard avait été déposé devant votre porte –
espérons que vous ne mettiez pas autant de mauvaise volonté à constituer une
famille que le mutique Clemente. C'est peut-être parce que lors des longs plans
silencieux où il apparaît frontalement il est en train de penser aux
Vieux
chats du chilien Sebastián Silva, et qu'il sait qu'avec la vieillesse
surgissent les conflits familiaux. A moins qu'il n'imagine son gamin grandir
comme le petit colombien Manuel : à essayer de récupérer son ballon de foot sur
un terrain miné, entre les guérilleros et les para des
Couleurs de la
montagne (Carlos César Arbeláez).
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Animal Kingdom |
Restons
dans l'hémisphère sud pour un petit passage australien du côté d'
Animal
Kingdom (David Michod), même si la famille de petits truands qui pètent les
plombs (et à-peu-près tout ce qu'il y a autour) est loin d'être accueillante.
Le rythme haletant de ce thriller vous prépare cependant moyennement à arpenter
les plaines de Mongolie avec
Les deux chevaux de Gengis Kahn et le
risque d'assoupissement est élevé – heureusement que vous rigolez encore de
l'image convoquée par le titre. Vous finissez cahin-caha par rejoindre les
pourtours de la Méditerranée et à l'arrivée en France c'est les récompenses :
le prix du jury jeune va à
L'art d'aimer d'Emmanuel Mouret (en salle
depuis le 23 novembre), et celui du public à
Tous au Larzac de Christian
Rouaud (lui aussi visible depuis le 23). Doit-on mettre la différence de ces
choix sur le compte des écarts de générations ?
Les
platanes gardannais commencent à reprendre de l'assurance, voilà que les
cinéphiles s'éparpillent. Que leur restera-t-il, à par des étoiles dans les
yeux ? Sans doute le goût des cachous-crottes de chèvres de
La pecora nera
de l'italien Ascanio Celestini, très fine évocations de l'univers de la folie. Et
certainement le visage sans expression de Kati Outinen dans
Le Havre :
Kaurismaki, grand chouchou du festival, fait entrer un nouveau sujet
contemporain (l'immigration) dans son univers coloré et rétro, à la gestuelle
poétique. En sortant de ce dernier film, c'est bien les effluves de la Manche que l'on sent caresser les
feuilles des platanes... Voilà de quoi balayer les miasmes de l'usine jusqu'à
l'année prochaine !
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Le Havre |
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