terça-feira, 29 de julho de 2014

Pierre papier ciseaux (Maylis de Kerangal et Benoît Grimbert)

Ce court livre, édité chez Le Bec en l'Air dans la collection Colatéral, et regroupant donc sous une couverture élégante textes et photographies, est le résultat d'un atelier d'écriture monté en Seine-Saint-Denis par Maylis de Kerangal. Trois récits distincts, correspondant à trois générations différentes, gravitent autour de l'espace de la Cité-Jardin, un ancien territoire agricole à l'apparence encore champêtre, peu-à-peu gagné par l'urbanisation des grandes tours HLM. Entre l'espace lié à la nature, qui subsiste encore sous la forme de terrain vague sauvagement envahi par les herbes, et les grands ensembles bétonnés construits à la hâte dans les années soixante devenu du temporaire de longue durée, un bâtiment est en train de surgir : les archives de France. C'est sur fond de cette mémoire en boîte qu'évoluent les personnages.




Ce sont d'abord les souvenirs d'une femme aujourd'hui âgée, qui se souvient de sa jeunesse dans ce quartier qu'elle n'a jamais voulu quitter. Potagers de l'enfance appelant aux rapines, impasses feuillues de l'adolescence où échanger discrètement les premières caresses, elle déplore aujourd'hui un quartier qu'elle continue d'aimer mais qu'elle considère menacé par la population immigrée entassée dans les tours voisines.

Où l'on trouve de jeune adolescent, comme celui du deuxième récit, qui tournent en rond dans le cercle restreint de leurs habitudes. Mais ce jeune personnage, attiré par une fille, va dépasser les frontières invisibles du terrain vague abandonné à la végétation, le "Champ", et ainsi commencer de s'ouvrir à ce qui l'entoure. Il glisse du quartier de classe moyenne au trajet RER vers Paris, et comme dans Corniche Kennedy l'amour adolescent, spontanné, devient la possibilité d'une ouverture sociale.
Le dernier récit raconte la mémoire d'une petite fille de cinq ans : fouillant en secret parmi ses trésors les plus précieux, elle cherche la continuité mystérieuse de son identité dans les objets qu'elle a décidé de garder. Un porte-monnaie Hello Kitty fait d'elle une vraie petite fille aux yeux du monde ; un mouchoir volé à sa mère la rattache à une tradition familiale volatile comme l'odeur qu'il renferme encore ; des photos où elle se reconnaît plus ou moins montrent les changements de son corps et lui permettent de se reconnaître.

En contrepoint des textes, les photos montrent des paysages de végétation touffue dressée devant une tour HLM, entre le terrain vague et le champ en friche. Parfois, de dos, un personnage qui paraît solitairement enfermé dans le silence et contempler avec mélancolie ces espaces mystérieux que l'homme tolère et craint à la limite de son monde.

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